If I stay here for you, did you will wait for me ?

1. Je suis née à Helena, dans le Montana, qui selon moi est le plus bel État du pays mais passons. J'ai grandi dans un tout petit appartement avec ma mère, mon père, notre chat Ficelle et c'est tout. Pas de frère, pas de sœur, personne pour jouer avec moi. Alors, j'avais mon amie imaginaire, Mia. Elle était super cool Mia, toujours d'accord avec moi, jamais le moindre mot, à toujours approuver ce que je disais. L'amie parfaite quoi. Enfin, j'ai perdu Mia quand on a déménagé à Cassas, j'avais quatre ans. C'est d'ailleurs cette année là que je suis devenue une grande fille et que j'ai décidé qu'il était temps de ne plus porter de couches et d'aller directement sur le pot. J'ai jamais compris en quoi c'était un exploit mais j'ai bien cru que ma mère allait organiser une fête de famille.
2. Nous sommes arrivés à Cassas au cours de l'été. Mes souvenirs de Helena sont vraiment éphémères, flous. Mais ceux de Cassas sont limpides comme de l'eau de roche. Je ne comprend toujours pas pourquoi Papa a décidé de quitter Helena mais en tout cas, il semblait vraiment heureux quand nous sommes arrivés devant cette petite ferme. Et autour de nous ? Des champs, de la forêt. Bref, rien de bien intéressant me direz vous. Et bien moi j'y voyais un immense terrain de jeu. Des endroits où courir, des endroits pour jouer. Je me voyais déjà m'allonger dans l'herbe sous le soleil d'une soirée d'été à humer l'air chaud et à savourer la caresse du vent sur ma peau, dans mes cheveux.
3. J'ai vraiment fini par m'habituer à cette vie campagnarde. Je me suis bien intégrée dans cette petite ville. Et je me suis faite une vraie amie cette fois ci. Une amie en chair et en os. Et elle s'appelait Mia. Mes moments préférés c'était quand on allait se rouler dans le foin en riant comme des pintades, parlant de garçons. J'ai toujours adoré ma vie mais je l'aimais encore plus quand j'étais près d'elle. Parce que je me disais que si on restait ensemble pour le reste de notre vie, il ne pourrait jamais rien nous arriver de mal. Parce que l'amitié c'est un bouclier protecteur, un bouclier qui nous permet de nous protéger du mal des autres. Je pensais vraiment que ce serait une amitié pour la vie.
4. J'ai rencontré Cole au début du lycée. Ça aurait put être une romance idyllique. Ça aurait pu, mais ça ne l'était pas. Cole, c'est Cole, il est comme il est. Je ne sais pas si c'est parce que je l'aimais vraiment passionnément que j'ai tout supporté ou parce qu'on était trop jeune mais on avait une relation tendue. Oh, je dis pas qu'il est le seul fautif, j'ai quand même mon sale caractère je le sais bien. Mais à ce point ? Je crois que je l'aimais autant que je le haïssais. On aurait du se séparer au moins des tas de fois, on se disputait toujours pour des banalités. Peut être qu'on était pas si compatible que ça. Pourtant, j'ai jamais cessé de l'aimer ce type, jamais.
5. En arrivant à Cassas, je ne pensais pas me prendre de passion pour quelque chose. Enfin, j'ai beaucoup de passion, dont celle d'enquiquiner mon monde. Mais surtout, j'ai découvert que j'adorais l'équitation. Plus le temps avançait et plus j'adorais ça, j'adorais chevaucher. Papa et Maman on finalement décidé de m'offrir mon étalon quand j'ai eu dix ans. Mais ce n'est qu'à l'âge de quatorze ans que j'ai pu enfin aller me balader tranquillement dans la campagne du Tennessee. Il y a des coins extraordinaires dans cet endroit.
6. C'est en 2008 que notre relation amoureuse a pris fin pour laisser place à une amitié banale mais qui ne me semblait pas fade au fond. Je ne voulais pas continuer à me morfondre sur mon sort et, selon mes parents, j'étais capable de devenir quelqu'un. Pourtant, je n'avais plus envie de m'occuper de mon avenir. J'avais travaillé dur et de toutes les universités où je voulais aller, Princeton m'a répondu positivement et j'ai été acceptée. J'ai pris mon courage à deux mains, j'ai fais ma valise, j'ai pris Mia sous mon bras et on est parties. On est parties toutes les deux pour l'université, pour Princeton. Et pour palier à ma folie, j'ai choisi un cursus dans la physique afin de devenir Astronaute. Oui, je voulais aller me perdre dans l'espace, là où le son ne passe pas. Je suis sûrement complètement folle de vouloir des choses comme ça mais peut être qu'un jour, je pourrais me vanter d'avoir ramener une étoile sur terre. Oui, je sais que je rêve beaucoup. Malgré tout, je continuais de parler à Cole comme si tout était parfaitement normal malgré que Mia râlait énormément. Je crois qu'elle ne l'aimait pas beaucoup. En 2009, mon téléphone a cessé de sonner. Il était devenu silencieux. Mes appels restaient sans réponse, jusqu'au jour où il m'a rappelé pour me dire de ne plus le harceler, qu'il avait une autre fille dans sa vie et qu'il allait se marier. Je ne sais pas ce qui me faisait le plus mal dans tout ça. Est ce que c'était le fait que j'endurais tout ça sans broncher en conservant mon sourire ou que je me rendais compte que j'étais folle d'amour pour un lâche, un salaud, un connard même. Je crois que c'était un peu des deux. Je me sentais tellement conne, tellement naïve. Je me serais frappée si j'avais pu. À partir de ce moment là, je l'ai sorti de ma vie, complètement. Tout ce qui pouvait me le rappeler était banni de mon esprit et de mon vocabulaire. Je ne prononçais même plus son prénom. J'espère simplement qu'il s'amuse bien et qu'il ne reviendra jamais pour pointer sa tronche face à la mienne.
7. J'ai perdu Ficelle à l'âge de treize ans. C'était quand même mon bébé chat. J'ai eu énormément de peine. Puis plus tard, j'ai perdu Cole. Là encore, j'ai eu énormément de peine. Mais alors que ma meilleure amie tentait de me consoler, on a décidé de sortir, d'aller faire la fête, de se lâcher comme on ne s'était jamais lâchées (je parle pas de pets hein). Alors, on est parties en quête d'une fête dans laquelle s'incruster. Les jeunes aiment bien faire des fêtes au bord de la rivière, autour d'un feu de camp. J'étais pas trop pour aller me saouler la face avec d'autres gens mais bon, il fallait que je sorte, que je me libère l'esprit, que je ne pense plus à ce foutu connard, que je me sociabilise et peut être que je tire mon coup par simple vengeance. On avait bien bu ce soir là. Mia avait insisté pour rentrer et prendre le volant. J'étais trop ivre pour me rendre compte que c'était une mauvaise idée. Ce n'est que lorsque je me suis réveillée à l'hôpital et que l'on m'a dit que Mia était morte que j'ai compris qu'on avait carrément déconné.
8. J'ai jamais fait mon deuil de Mia, je porte toujours la bague d'amitié qu'on s'était offerte. Je crois que je ne pourrais jamais me sentir autrement que coupable et responsable de sa mort. Parce que j'aurais du lui dire de ne pas prendre la voiture. Moi, j'ai fais trois semaines de coma. Je ne me pensais pas capable de dormir aussi longtemps même si j'adore ça. J'avais le haut de la jambe droite complètement détruit. Il paraît que désormais, je suis bionique. J'ai des vis et des plaques pour maintenir tout le bordel de mon corps en place. J'ai aussi une belle cicatrice qui part du haut de ma hanche jusqu'en bas de ma cuisse. Autant dire que je suis monstrueuse sans vêtement. Je déteste cette cicatrice, elle me rend laide, elle me rappelle ma bêtise. J'ai du faire une année entière de rééducation et j'ai marché avec des béquilles pendant longtemps. Mais depuis un an, j'ai une canne. Une superbe canne en bois que je déteste tout autant. Je m'en sers rarement parce que je ne veux pas donner la sensation d'être handicapée, je ne suis pas handicapée. Mais quand il fait mauvais ou qu'il fait froid, je me mets à boiter. Je me sens réduite et je déteste ça. Après mon accident et toute l'histoire de ma jambe, j'ai du me résigner. Astronaute ce n'était plus pour moi. J'ai du partir sur autre chose de totalement différent. Je suis partie à Nashville et je me suis lancée dans des études de fleuriste. Après mon accident, je ne suis plus jamais montée à cheval, je ne peux plus, ma jambe est bien trop douloureuse. Tout comme mon cœur.
9. J'ai fini par revenir dans la vie normale et j'ai été embauchée chez le fleuriste que ma mère connaît bien. J'y travaille depuis quatre ans maintenant et je trouve ça très intéressant. Je suis devenue une super professionnelle de la composition florale et je me félicite que mes plantes soient très vives. Je sais qu'ici je peux exercer mon pouvoir d'inventivité. Je suis souvent engagée pour les événements comme les mariages, les enterrements, les baptêmes ou autre fête nécessitant des fleurs. Ma vie est toute tranquille, mon sourire et mon air joyeux sont revenus. Je continue de faire rire mes clients avec un humour bien à moi. L'humour de Ro ! Je me sens bien. Mes moments préférés sont quand je vais m'installer en hauteur et que j'admire le coucher de soleil. Les couchers de soleil en hiver sont parfaits, magnifiques. J'immortalise ces moments dans ma mémoire en me disant que désormais, je ne laisserai plus rien venir gâcher ma tranquillité. Je réfléchis à mon avenir quand je suis au calme comme ça. J'ai des envies de voyages, de liberté. Je me dis que je pourrais avoir mon propre magasin de fleurs. Peut être être même que je pourrais acheter une parcelle de terre et planter mes fleurs, faire des serres ? Nashville c'est pas si loin quand on y pense. Je pourrais devenir une fleuriste célèbre, importer mes fleurs, tenter d'en trouver de nouvelles. Quand j'y pense comme ça, ça me fait rire mais au fond, je crois que je suis sérieuse. Je pourrais reprendre mes études, j'en suis capable je le sais. J'ai assez de côté pour le faire. Et puis, on a qu'une vie non ?
10. Je vis dans une dépendance de la ferme de mes parents. Ça me convient parfaitement d'avoir cinquante mètres carrés rien que pour moi. Je me suis offert un chien pour tuer le silence de mes soirées. Un gros chien qui pèse près de soixante-dix kilos maintenant. Je comprends pas comment il a fait pour devenir aussi énorme, il était si petit quand je l'ai accueilli chez moi. Enfin, il me tient chaud en hiver. On se met dans mon canapé, sous la couverture et on se regarde des films. Un vrai petit couple. C'est mon bébé. Je voulais l'appeler Chocolat mais ma mère m'a dit que ça n'était pas très approprié pour un chien. J'ai soupiré d'agacement puis finalement, je l'ai appelé Zeus. Je sais pas pourquoi, je trouvais que ça lui allait parfaitement bien. Bref, ma vie est classique désormais. Je vis une vie de célibataire, au grand damne de ma mère qui aimerait avoir des petits enfants. Mon père lui, il voudrait avoir un beau-fils pour l'aider et pour le menacer de lui couper les parties s'il me rend malheureuse. Parfois, je me dis que je devrais partir moi aussi. Ils sont pénibles mais je les aime. J'aime ma vie tranquille. Que rien ne vienne perturber tout ça...